Extrait de "La presse médicale" novembre 1999
Article "Les téléphones cellulaires et leurs stations relais : risques pour la santé?"
de R. Santini, Docteur ès-sciences Institut National des Sciences Appliquées


Exposition en champ lointain

L'exposition en champ lointain est celle que subissent les populations exposées aux radia­tions non ionisantes générées par les antennes de stations relais de téléphones cellulaires. Dans l'environnement proche (quelques mètres) de stations relais, des densités de puis­sances élevées de champs électromagnétiques sont mesurées. Elles peuvent atteindre plusieurs centaines de microWatts par centimètre carré (µW/crn2) à proximité des antennes émettrices. Ces valeurs décroissent avec l'éloignement et à une distance de 300 mètres la densité de puissance n'est plus que de 1 µW/cm2. Cette dernière valeur pourrait consti­tuer le seuil maximal pour l'exposition chro­nique des riverains de stations relais [2] L'existence dans l'environnement des stations relais de matériaux métalliques susceptible de jouer un rôle de «réémetteurs passifs» : châssis et volets de fenêtres, portes de garage, échelles,... Ces structures sont capables de réfléchir, en les amplifiants parfois, les ondes électromagnétiques [7];

Le fait que les densités de puissances élec­tromagnétiques émises par les stations relais sont dépendantes du nombre de communications traitées par la station [8]. Ceci conduit à des fluctuations des puissances générées dans l'environnement en fonction des moments de la journée, voire des périodes de l'année. Au regard de ce qui précède, une mesure ponctuelle des champs électromagnétiques dans l'environnement d'une station relais paraît insuffisante pour avoir une idée du niveau de l'environnement électromagnétique auquel sont soumis les riverains.

 

Principaux effets biologiques

 

La «maladie des radiofréquences» ou «syndrome des micro-ondes»

Dès 1966, des travaux issus des pays de l'Est soulignent l'existence de symptômes particuliers chez les travailleurs et des personnels militaires exposés de façon chronique (plusieurs années) à des hyperfréquences. Ces résultats n'ont pas été pris immédiatement en considération par la Communauté scientifique internationale [9]. Cependant, en 1998, une publication américaine [10] confirme que cette «maladie des radiofréquences » également appelée «syndrome des micro-ondes » est une réalité médicale liée à l'exposition aux hyperfréquences pulsées, ce qui est le cas, rappelons le, de la technologie utilisée pour les téléphones cellulaires.

Parmi les principaux symptômes de la «maladie des radiofréquences», il est rapporté:

un syndrome asthénique : fatigabilité, irritabilité, céphalées, nausées, anorexie

un syndrome dystonique cardio-vasculaire:

modifications de la fréquence cardiaque, variations de la pression artérielle

un syndrome diencéphalique : somno­lence, insomnie, troubles sensoriels (dimi­nution de l'odorat).

Une étude épidémiologique a été réalisée en 1998 par l'Institut National Suédois qui a analysé 11.000 réponses à un questionnaire d'utilisateurs norvégiens et suédois de télé­phones cellulaires [11]. Les principales ano­malies décrites par les participants à cette étude, sont : maux de tête, picotements au visage et à la tête, vertiges, fatigue anormale, sensation de chaleur autour et sur l'oreille. Ces symptômes sont trouvés, pour la majo­rité d'entre eux, dans la « maladie des radiofréquences» et sont proches de ceux affec­tant les personnes «électrosensibles».

 

Autres effets rapportés

Il s'agit de:

Effets oculaires avec risques d'opacification du cristallin et modifications possibles de la sen­sibilité de l'oeil aux hyperfréquences sous l'ac­tion de médicaments ophtalmologiques [121;

Modifications de l'électroencéphalo­gramme [13];

Modifications de la pression artérielle [14].

Perturbation de stimulateurs cardiaques[15];

Risques cancérogènes: augmentation significative du risque de lymphomes chez la sou­ris exposée à une émission hyperfréquence de type GSM [16]; augmentation du risque de certains cancers chez les travailleurs, les mili­taires,... exposés aux hyperfréquences [17]; selon une étude épidémiologique suédoise de 1999 [18] augmentation (+2,4 fois) non significative chez les utilisateurs de télé­phones cellulaires (intervalle de confiance 0,78-7,76) du risque de tumeurs temporales ou occipitales du côté où est appliqué le télé­phone portable pour communiquer

Il n'y a pas, actuellement, d'étude épidé­miologique sur les effets de l'exposition de populations aux ondes électromagnétiques générées par les stations relais. Cependant, dans le Rapport australien [8] de 1996, il est signalé qu'à 200 mètres d'une station relais de téléphones mobiles cellulaires, des per­sonnes exposées dans leur logement se plai­gnent de troubles, tels que fatigue chronique, allergies multiples, perturbations du sommeil, ménopauses prématurées,... qui rappellent là encore, certains des troubles mentionnés dans la « maladie des radiofréquences».

 

 

Conclusion : les mesures de protection

 

Pour les populations riveraines de stations relais

Si la station est déjà installée à moins de 300 mètres, signaler à son médecin les symptômes pouvant rappeler ceux de la "maladie des radiofréquences". Il convient de mettre en place une politique d'information des riverains sur les risques biologiques potentiels, associée à un contrôle régulier de l'environnement électromagnétique autour des stations relais. L'évolution de l'état de santé des personnes exposées aux hyperfréquences devant faire l'objet d'une écoute particulière de la part du personnel médical.

Si la station n'est pas encore construite, exiger une concertation préalable avec les décideurs, les personnels de santé et deman­der, en application du principe de précau­tion, l'évitement prudent des zones où vivent des populations sensibles (écoles, garderies, centres gériatriques, maternité, hôpitaux...). l'évitement prudent pourrait être le fait, par exemple, d'une orientation judicieuse des antennes de la station relais, en faisant en sorte que le lobe principal généré par ces structures "n'illumine pas " ces populations sensibles.

Au niveau européen, une prise de conscience des risques biologiques semble se manifester. C'est ainsi que l'état Ita­lien, dans un Décret n0 381 du 10 sep­tembre 1998, vient d'adopter, pour l'expo­sition des populations aux hyperfré­quences générées par les stations relais, une limite de 10 µW/cm2. Ce seuil est 45 à90 fois plus bas que les valeurs figurant dans les pré-normes actuelles, à savoir 450 µW/cm2, en 900 MHz et 900 µW/cm2, en 1.800MHz.

[haut de page]